« Je ne suis pas ta mère » de Rosemonde Pierre-Louis, un livre pour l’imprescriptibilité des viols sur mineurs

2023-06-08 16

« Je ne dis pas qu’il faut mettre tout le monde en prison mais il faut laisser la latitude aux agréssé.es de pouvoir parler et de se faire entendre ». Avec la publication de son premier roman « Je ne suis pas ta mère », Rosemonde Pierre-Louis a choisi de briser l’omerta autour des violences sexuelles sur mineurs. Sans misérabilisme, elle retrace son enfance d’abord à Haïti puis à Paris et raconte les viols dont elle a été victime à l’âge de cinq ans, six ans et douze ans.

A 43 ans, la cheffe d’entreprise a su se reconstruire et « ne s’en sort pas trop mal », elle souhaite libérer la parole : « Combien d’entre nous se sont suicidés ? Ont des comportements sexuels à risque ou déviants ? » mais aussi faire changer la loi. En France, un mineur peut porter plainte pour agression sexuelle jusqu’à 10 ans après sa majorité, s’il avait quinze ans ou plus au moment des faits ou 20 ans après sa majorité s’il avait moins de quinze. Pour un viol sur mineur, le délai de prescription est de 30 ans mais peut être prolongé si le même auteur viole par la suite un autre mineur.

« Vingt ans, cinquante ou même indéfiniment, on aura jamais assez de preuves »

Mais pour Rosemonde Pierre-Louis, l’imprescriptibilité est indispensable. Cela pourrait créer une « prévention de savoir que quoi qu’il arrive, à un moment donné, quelqu’un parlera » et rappelle que les victimes mettent entre quinze et dix-sept ans avant de commencer à prendre conscience de ce qu’elles ont subi. Concernant les démarches et les preuves demandées des années après les faits, « que ce soit à vingt ans, cinquante ans ou même indéfiniment, on en aura jamais assez ».

La fin de la prescription signifierait pour elle que les victimes sont prises en considération, que la société comprend leurs douleurs et estime que « ce n’est absolument pas juste de laisser en liberté des personnes [les agresseurs] vivre leur vie comme si de rien n’était. » L’écrivaine ne se pose pas en « justicière » mais souhaite une réelle réflexion sur ce sujet.

« Avant d’oublier, il faut comprendre. S’interroger aussi sur pourquoi les personnes agresse ? Ont-ils les pleins pouvoirs ou ils reproduisent des violences qu’ils ont eux-mêmes subies ? Est-ce qu’ils continuent parce qu’on les laisse agir ? » Un travail « presque psychologique mais impératif pour avancer » que Rosemonde Pierre-Louis accomplit dans son roman.
Retrouvez l’interview vidéo de Rosemonde Pierre-Louis en tête de l’article.

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